Un sparadrap à cinq milliards

Un sparadrap à cinq milliards

C’était il y a quinze ans, et pourtant « l’affaire Kerviel », du nom du trader qui lui a fait perdre des milliards, poursuit encore aujourd’hui la Société Générale.

Pour preuve, en février 2023, la presse en refait ses gros titres lorsque Jérôme Kerviel porte plainte contre la banque. Il accuse son ancien employeur d’avoir trompé la justice, en omettant de l’informer qu’elle avait récupéré 1,7 milliard des quelque 5 milliards de pertes que la banque lui impute. En réaction, la Société Générale le poursuit pour « dénonciation calomnieuse ».

Encore un procès ; cela n’en finira-t-il donc jamais ? Le 1er janvier 2023, le groupe, qui a fusionné avec le Crédit du Nord, en profite pour tourner la page pour de bon.

Comme souvent, cet objectif se traduit par un changement de nom. Sans révolution : désormais, la banque devient SG. Impossible de déterminer le poids du boulet Kerviel, mais on se souvient du Crédit Lyonnais, rebaptisé LCL après l’affaire Tapie.

Ce qui lui avait plutôt réussi. Son lien avec l’entrepreneur vedette des années quatre-vingt s’est estompé dans les mémoires. Mais pourquoi donc Jérôme Kerviel persiste-t-il sur la rétine de l’opinion ?

Sans doute à cause d’une erreur initiale de ses dirigeants : la Société Générale a cru bien faire en faisant porter la responsabilité de la fraude sur un seul individu, en livrant son nom et son pedigree. Elle a ainsi incarné la crise.

Toute personnalisation donne un relief particulier, fixe l’opinion sur une personne, pour le pire et le meilleur. L’oubli devient encore plus difficile. Les « méchants » de l’histoire sont toujours mémorables. L’affaire Tapie a d’ailleurs fait l’objet d’une série Netflix. Gare au retour de bâton pour le Crédit Lyonnais. La fiction peut avoir davantage de poids que l’actualité pour redorer – ou saper – une image.

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