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Trois lettres pour convaincre

Le rebond peut passer par l’outil favori des réseaux sociaux, l’humour. Quand le groupe de poulet frit Kentucky Fried Chicken, dit KFC, s’est retrouvé paralysé par une embarrassante pénurie de poulet, il n’a pas choisi de présenter de laborieuses excuses.

KFC vivait pourtant le comble du ridicule.

Alors que les réseaux sociaux commençaient à bouillir, sous l’effet de l’énervement de ses clients, le groupe américain retourne les codes d’autodérision d’Internet. Il inverse les lettres de son sigle dans une campagne impertinente, avec un pot de poulet estampillé “FCK”. Une interjection qui exprime immédiatement sa propre colère devant cette situation, avec une teinte d’autocritique. Succès garanti ! Ses consommateurs apprécient sa franchise et le groupe en fait les complices, presque les confidents de ses déboires. Une parade à la volée, qui suffit à faire évanouir la colère. KFC a mis les rieurs de son côté.

– Gérer une fake news –

Qui commet une erreur doit en gérer les conséquences. Mais comment répondre aux critiques contre des méfaits imaginaires ? La désinformation prend de telles proportions que rares sont les entreprises qui échappent aux calomnies inventées de toutes pièces. Même fondées sur du vent, elles sont propagées à une vitesse folle par des internautes qui en renforcent la crédibilité. Et comme nous l’avons vu, il suffit d’une poignée de faux comptes et de bots pour faire émerger n’importe quel sujet.

Sur un réseau comme Facebook, les publications les plus virales sont systématiquement des fake news, et elles concernent en priorité des entreprises. Les mêmes secteurs sont presque toujours visés : pharmacie, chimie, énergie, alimentation… Quels que soient les engagements de sa maison mère, Meta, à promouvoir les vérifications de rumeurs avec des équipes de journalistes professionnels, Facebook est une régie publicitaire qui vit de la viralité des fake news. Les marques doivent faire face à des posts totalement diffamatoires, qui ne passeraient jamais dans un vrai média.

La règle est simple : il ne faut rien laisser passer.

Impossible de traiter ces affirmations par le mépris. Même si ces écrits sont infondés scientifiquement et techniquement, ils peuvent saper la réputation d’une marque car ce contenu sera référencé sur les moteurs de recherche. Les fake news surfent sur l’émotion et la crédulité du public. Elles paraissent vraies, car elles sont souvent inspirées d’informations vraies. Ainsi, lorsqu’un militant d’extrême droite a prétendu qu’Astérix, symbole national, serait réécrit dans des codes woke, à l’instar des romans de Roald Dahl, plusieurs grands médias sont tombés dans le panneau en reprenant cette histoire fausse. Idem lors de la publication de fausses photos montrant des musulmans en prière dans les couloirs du Palais de Justice.

Pour une entreprise, une contre-attaque efficace impose de démentir et de déconstruire la fausse information aussi vite qu’elle est apparue. Mais dans la pratique, lutter contre une rumeur requiert souvent du temps et des moyens. Pour convaincre face à des accusations fantasmées, les réponses doivent au contraire être construites et argumentées. McDonald’s a dû patiemment prouver que le cercle blanc sous ses hamburgers n’était ni de l’anti-vomitif, ni de la cocaïne destinée à rendre les consommateurs dépendants de ses produits, mais un dispositif anti-vapeur. « Pourquoi personne ne vomit ses Big Mac ? » demandaient les complotistes. Comment répondre ? Par de la transparence. Outre les explications sur les fameux cercles blancs, le groupe s’est même résigné à dévoiler la recette de la sauce de son Big Mac dans une vidéo. Le secret de ses ingrédients alimentait sans doute des fantasmes.

L’enseigne Nature & Découvertes a mis quinze ans à enfin convaincre qu’elle n’était en aucune façon liée à l’Église de scientologie, contrairement à une rumeur tenace. Comment a-t-elle réussi ? En sollicitant un avis public de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) qui a conclu sans ambiguïté à l’innocence de la chaîne. Les marques ont enfin compris qu’il leur faut affronter frontalement leurs détracteurs sur ces sujets sensibles, afin d’éliminer tout ce qui menace leur lien de confiance avec leur public.

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