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Le syndrome de la cocotte-minute en communication : illustration avec les “Violences Policières” 👮

“Quelque honte que nous ayons méritée, il est presque toujours en notre pouvoir de rétablir notre réputation”. La Rochefoucauld

“Violences Policières” : le syndrome de la cocotte-minute a frappé la communication gouvernementale.

L’Actualité nous offre l’illustration parfaite du syndrome de la cocotte-minute avec les “violences policières”… en même temps qu’elle nous offre un face à face frappant : alors que David Le Bars, Secrétaire Général du syndicat des commissaires de la police nationale française, publie La Haine dans les yeux dénonçant la violence envers la Police; David Dufresne, journaliste recensant les blessures subies lors d’opérations de maintien de l’ordre, publie Dernière sommation, pour dénoncer la violence de certains policiers.

Les communicants de crise le savent bien : l’opinion publique est une cocotte-minute qui peut exploser pour plusieurs raisons.

  • Quand l’actualité médiatique met l’accent sur un fait en particulier, créant un pic d’attention de l’opinion publique qui focalisera toute son attention sur ce sujet lui donnant le sentiment qu’il est un “phénomène” généralisé … Une autre actualité viendra chasser la précédente aussi rapidement que la première est apparue (mais c’est un autre sujet^^). Entre temps, la pression sociale sera née.
  • Mais aussi si la soupape de fonctionnement est mal placée, et qu’elle ne régule pas la pression de la chaleur comme elle se doit.

La soupape, face à l’indignation suscitée par les images d’utilisation illégitime de la force, c’était évidemment une parole politique forte du Ministre de l’intérieur, du Premier Ministre ou du Président de la République censés, stratégiquement, à la fois protéger l’institution policière en condamnant les dérapages indignes mais aussi rassurer la population française afin qu’elle continue d’accorder sa confiance aux policiers. C’est le principe de l’étanchéisation. Condamner fermement un acte, s’en démarquer nettement, l’isoler, afin qu’il fasse fusible et protège un ensemble. L’idée étant de ne jamais laisser à penser que vous cautionnez, que vous niez ou que vous minimisez.

Les Gilets Jaunes ont, pendant près d’un an, saturé l’espace médiatique et digital. Ils ont ainsi crée une pression médiatique forte sur l’institution policière, souvent maladroitement d’ailleurs en stigmatisant l’institution sans réussir, la plupart du temps, à dénoncer des dérives individuelles. L’un des porte-parole les plus médiatiques des Gilets Jaunes, lui-même éborgné, a fini par incarner physiquement la dénonciation de ces violences sur les plateaux TV.

La cocotte-minute peut également exploser si, vous la laissez sur le feu trop longtemps et qu’elle surchauffe. Or, la question de l’utilisation illégitime de la force a d’abord été trop longtemps laissée sur le feu par des responsables politiques manquant de courage. La rigidité des postures politiques affichées, couplées à une stratégie de communication politique de l’autruche a continué à faire monter la pression et à hystériser les critiques qui s’exprimaient contre l’institution policière sans que jamais Christophe Castaner, Ministre de l’Intérieur, ne comprenne qu’il ne serait pas un bouclier efficace pour la réputation de ses hommes s’il n’acceptait pas de condamner fermement les cas d’utilisation illégitime de la violence.

Une communication politique maladroite a pris en otage l’image de l’institution.

Pour éviter les crises, la solution face aux risques, c’est toujours de communiquer. Il faut communiquer dès les premiers soubresauts de la crise et non à la fin lorsque le mal est fait. Or, aujourd’hui, on peut considérer que l’institution policière souffrira médiatiquement durablement de ces cas isolés de policiers qui dérapent et salissent l’institution toute entière. Le feuilletonnage médiatique est en route

Chaque minute compte en communication de crise. C’est la loi des sapeurs-pompiers :”Une minute, un verre d’eau ; dix minutes, un camion ; une heure, une caserne.”

L’erreur encore trop régulièrement commise par les ministres est liée au mutisme dont ils font preuve dès le début de la crise.
La plupart du temps, face à la réalisation d’un risque, la politique de l’autruche adoptée par un ministre conforte ses publics dans ses interrogations. La crise s’amplifie ensuite structurellement grâce aux rumeurs et aux informations déformées par les réseaux sociaux enfermant chacun dans des bulles cognitives nuisibles à la sérénité du débat.

Si l’institution policière est aujourd’hui confrontée dans une partie de l’opinion publique à une défiance, c’est d’abord parce que “son” Ministre a été incapable de jouer un rôle de premier plan dans le cycle de l’information autour du risque, ce qui lui a été préjudiciable. Des journalistes ont recensé les violences parce que l’institution s’est révélée incapables de communiquer sur les chiffres des blessés. Des journalistes se sont interrogés sur l’impunité de l’institution parce qu’elle a, dans un premier temps, tardé à communiquer sur les suites données aux enquêtes de son corps de contrôle, l’IGPN.

Pour le communicant, il y a deux grandes façons d’approcher une crise, la cacher ou la dramatiser avec empathie. La bonne communication de crise, c’est celle qui rassure le public tout en restant dans la réalité des faits. Les communicants politiques qui pensent qu’un ministre ou un responsable politique prend un risque en tentant de rassurer, se trompent. Je les entends répéter à leurs patrons “si on communique trop, on prend le risque de créer des dommages d’image”. Le constat est simple aujourd’hui. En niant l’impérieuse nécessité de communiquer rapidement en condamnant fermement les dérives individuelles, c’est l’image de l’institution toute entière qui en souffre. Et c’est un échec pour ceux qui avait pour mission de la protéger.

Florian Silnicki

 

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